Traitement des données obtenues par le téléscope
Les mesures d'intensités sont effectuées par des CCD. Il s'agit de mosaïques de capteurs qui vont chacun représenter un pixel. Ces dispositifs sont photosensibles et libèrent des électrons lorsque atteints par un photon. Le système augmente ensuite le nombre d'électrons afin d'avoir un signal mesurable. Celui-ci est proportionnel à l'intensité lumineuse.

Ces capteurs ne sont pas parfaits :
L'agitation thermique peut déclencher la libération d'électrons : il s'agit de dark counts. Pour remédier à ce problème, on réalise une série de mesures sans aucun éclairage afin d'obtenir leur valeur. Il est ensuite important de paramétrer la quantité de lumière parvenant dans le CCD afin qu'elle soit suffisamment grande devant la valeur des dark counts. Ce courant d'obscurité est proportionnel à la température du CCD. On refroidit donc les capteurs à une température de l'ordre de -20 °C pour le minimiser.
Chaque élément de capteur n'a pas exactement la même sensibilité. On effectue une mesure avec un éclairage homogène (flat field) sur toute la surface des CCD. On pourra ainsi connaître les différences de sensibilité associées à chacun des éléments du CCD. Il est cependant difficile d'obtenir un éclairage homogène avec un spectromètre étant donné qu'il faut avoir une puissance égale à chaque fréquence. Le flat field s'obtient donc en éclairant le spectromètre avec une lumière de spectre connue. Le flat field permet aussi de corriger les éventuelles imperfections présentes sur le matériel optique.
À partir de ces deux séries d'expériences, on va pouvoir, à l'aide de programmes de traitement, retirer la valeur des dark counts à l'image et corriger l'intensité mesurée par chacun des pixels du CCD.
La première image ci-dessus est une observation brute. Sans correction : c'est le résultat que nous donnent les capteurs CCD. Après une correction grâce au flat, on obtient la seconde image à la photométrie plus juste.
On travaille à 80% de la saturation des CCD suivant la sensibilité à la couleur rouge (la sensibilité du capteur étant dépendante de la longueur d'onde). De cette façon on peut négliger le bruit sans pour autant saturer les capteurs. Si trop de lumière entrait, le système qui multiplie le nombre d'électrons se viderait entièrement et ne pourrait plus fonctionner linéairement : le courant électrique ne sera plus proportionnel au nombre de photons reçus. Le CCD peut supporter un maximum de 300 000 photo-électrons par seconde : on choisit de travailler 20% en dessous du maximum par mesure de sécurité.
L'obtention des paramètres de Stokes nécessite une comparaison de différents clichés. On effectue la soustraction d'un cliché par rapport à l'autre (image ci-dessus). Le premier problème rencontré va être le besoin d'un alignement parfait des images afin qu'il y ait correspondance. En effet le déplacement du soleil dans le ciel est suivi par les mécanismes du télescope mais le mouvement des différents composants se ressent sur les clichés.
Un programme recentre les images en se servant d'un repère fixe : une raie connue pour les abscisses et la position du point d'inflexion de l'intensité lumineuse dans le limbe solaire pour les ordonnées.
Pour corrgier le mouvement qui a eu lieu entre deux prises, on décale la seconde image avec un programme qui calcule alors la corrélation entre celle-ci et la première.
Rapport signal/bruit
Les mesures dans le limbe sont rendues difficiles par le fait que moins de photons nous en parviennent.
De plus les paramètres U et Q sont très faibles par
rapport à I. Pour un pixel de CCD, la statistique du nombre de photons détectés pour une durée de mesure
donnée est une loi poissonienne. On définit ici le bruit sur la mesure comme étant l'écart type de la loi de
probabilité.
Or pour une poissonienne σ = √n où n est la valeur moyenne du nombre de photons comptés.
Le rapport signal sur bruit qui décrit la précision de la mesure est n/σ donc √n. Si on effectue une mesure
d'une durée m fois plus longue, alors la valeur moyenne devient m.n et le rapport signal sur bruit &radic(m.n)
Pour avoir des mesures suffisamment précises, il faut donc augmenter le temps d'exposition jusqu'à obtenir
un rapport signal sur bruit satisfaisant. Cependant on note que pour augmenter la precision d'un facteur
10, il faudra réaliser une mesure 100 fois plus longue. Une mesure durant 3 minutes est possible mais pour
des durées plus longues, la stabilité limité des instruments et la dynamique solaire vont fausser la mesure.
On peut continuer à améliorer la précision des mesures en moyennant les valeurs obtenues sur plusieurs
pixels ; on sacrifie alors une partie de la résolution spatiale.