Les semi-conducteurs et leurs applications

 

Cette partie présente quelques notions sur les semi-conducteurs, nécessaires à l'interprétation des résultats obtenus lors de nos mesures de réflectivité.
Toute les informations sont issues de cours et d'explications donné(e)s par des enseignants ou enseignants/chercheurs lors de nos journées en laboratoire.


Introduction

          Un échantillon de matière solide placé dans un champ électrique montre en général l'un des deux types de comportement: conducteur ou isolant, selon qu'il y circule un courant électrique ou non.
L'observation courante montre que les métaux sont en général de bons conducteurs tandis que les matériaux ioniques, covalents ou moléculaires sont en général des isolants. La conductivité est en effet liée à la présence d'électrons susceptibles de se déplacer facilement dans le solide, sous l'action d'un champ électrique appliqué. Encore faut-il que ce champ soit suffisamment fort pour vaincre l'énergie de liaison des électrons.

 

La conductibilité électronique des solides et la théorie des bandes

          La maille cristalline des métaux est constituée en première approximation par un empilement d'ions positifs, peu chargé en moyenne, et d'électrons de valence (électrons situés sur la couche externe du nuage électronique) relativement mobiles dans le réseau car ils subissent peu l'attraction électrostatique qui les lie à l'atome en raison de leur distance élevée à celui-ci.

On considère dans un premier temps qu'un électron se meut dans un potentiel électrostatique constant, positif par rapport à l'extérieur. L'électron ne peut pas quitter le solide. Dans ce modèle, dit de la boîte vide, on néglige les importantes variations de potentiel que subit l'électron au voisinage des ions positifs du réseau ainsi que les interactions entre électrons.
On peut montrer que l'électron dans la boîte vide ne peut occuper que des niveaux d'énergie discrets, c'est à dire que son énergie est quantifiée, comme dans l'atome. Le niveau d'énergie le plus élevé occupé s'appelle niveau de Fermi, il est fonction de la température.

Si en potentiel continu l'électron est délocalisé dans la boîte, en potentiel périodique l'amplitude de l'onde associée à son déplacement et modulée avec la périodicité du réseau: la probabilité de présence de l'électron est plus grande près d'un ion positif, ce qui se conçoit bien en terme d'attraction électrostatique. Tant que la modulation reste faible, loin d'un ion positif l'électron se meut comme dans la boîte vide. A proximité d'un ion positif, la modulation devient forte, la perturbation de l'énergie est grande et l'électron peut posséder deux niveaux d'énergie nettement séparés : l'intervalle qui sépare ces deux niveaux s'appelle le gap ou bande d'énergie interdite.
Dans le solide, si l'on considère l'échelle des états d'énergie possibles il apparaît une série de bandes d'énergie permises accessibles aux électrons séparés par des bandes interdites. Un solide cristallisé est caractérisé par sa structure de bandes.

 

Isolants et conducteurs

- Les isolants:

          Le principe d'exclusion de Pauli et les règles de remplissage des niveaux électroniques conduisent à admettre que la première bande (celle dont les énergies sont les plus faibles) est pleine: c'est la bande de valence. La deuxième bande, au dessus de la bande interdite est vide même à des températures élevées car le gap est grand devant le terme d'agitation thermique. Cette deuxième bande est appelée bande de conduction. Elle est  vide. L'excitation d'un électron depuis le haut de la bande de valence jusque vers le bas de la bande de conduction (sous l'action d'un champ électrique par exemple) est très difficile: cela revient à dire que le niveau de Fermi est trop éloigné de la bande de conduction.

- Les conducteurs:

          La situation est très différente lorsque la première bande d'énergie n'est pas complètement remplie par des électrons (comme dans le cas des métaux alcalins ou des métaux de transition). La bande qui pourrait en principe accueillir les électrons de valence reste incomplète et les états occupés sont ceux de plus faible énergie. Dès que l'on soumet le matériau à un champ électrique chaque électron est soumis à une force et et sa quantité de mouvement varie. les sauts dans les sites vacants de la zone sont possibles et l'ensemble des états occupés est soumis à une translation: il y a conduction d'un courant électrique, le matériau est alors conducteur. Dans les conducteurs électriques, la bande de valence est incomplète. Les électrons peuvent passer à des niveaux d'énergie supérieurs et devenir libres de se déplacer sous l'effet d'un champ électrique.

 

Les semi-conducteurs

          Les semi-conducteurs sont ainsi appelés parce qu'ils sont conducteurs à température élevée ou plutôt mauvais conducteurs d'ailleurs si on les compare aux métaux, mais ils sont isolants aux très basses températures. Cette particularité est liée à la fois à la structure cristalline et à la nature de la liaison chimique qui les caractérisent. L'élévation de température n'est pas la seule cause qui rende un matériau semi-conducteur conducteur. Toute excitation, qui apporte l'énergie minimum nécessaire pour emmener des électrons de la bande de valence jusqu'à la bande de conduction, autorise la conduction: il s'agit alors de conductivité induite.

Semi-conducteurs dopés:

          Ce qui précède concernait les semi-conducteurs intrinsèques, c'est à dire élaborés à haut degré de pureté (moins de 0,1 ppm d'impureté). L'inclusion volontaire d'un élément étranger de nature connue et en proportion parfaitement définie constitue le dopage du matériau semi-conducteur. Ce dopage à un effet sur les propriétés de conduction du semi-conducteur.

Selon la nature chimique de l'élément dopant, deux cas peuvent se présenter:

- L'élément étranger possède un électron de valence de moins que l'élément constitutif du matériau qu'il remplace. Dans ce cas la substitution a pour effet de créer un déficit électronique on dit aussi un trou positif (car l'absence de charge négative dans un milieu chargé négativement peut-être vue comme une charge positive). Le matériau est dopé de type P.

 -L'élément étranger possède un électron de plus que l'élément constitutif du matériau qu'il remplace. La substitution a pour résultat de créer un excédent de charges électronique. Le matériau est dopé de type N.

Prenons par exemple un semi-conducteur silicium.
Supposons dans un premier temps qu'on le dope avec de l'aluminium. Pour le silicium, l'aluminium est un dopant de type P puisqu'il possède un électron de moins dans son cortège électronique. S'il se substitue sur un site cristallographique de la structure de silicium, il lui manque un électron pour échanger quatre liaisons avec les quatre voisins. Le résultat est qu'il se retrouve ionisé négativement et qu'à proximité, un atome de silicium se trouve ionisé positivement. Le matériau restant bien entendu globalement neutre électriquement.
Supposons maintenant que notre semi-conducteur initial soit dopé avec du phosphore. Le phosphore est l'élément suivant le silicium dans la classification, il possède donc un électron de plus et constitue dans ce cas un élément dopant de type N. Lorsqu'il se substitue à un atome de silicium, il échange quatre liaisons de covalence avec les quatre voisins et il lui reste un électron libre. Il s'ionise donc positivement et libère un électron dans le réseau cristallin, le matériau semi-conducteur restant toujours globalement neutre du point de vue électronique.

 

Déplacement d'un électron dans un cristal. Exemple d'un dopage de type P.

 

L'exciton

          Lorsqu'un électron passe de la bande de valence à la bande de conduction, il laisse une place libre dans la bande de valence. Nous avons dit plus haut que ce trou pouvait être considéré comme une particule chargée positivement. En réalité le trou et l'électron se comportent comme un atome d'hydrogène: l'électron se met en rotation autour du trou. Cette pseudo particule issue du système électron + trou s'appel exciton. Elle correspond au premier état excité du cristal, son énergie est légèrement inférieure au gap en raison de l'interaction entre les deux particules. L'exciton correspond à une résonance particulière du matériau et peut-être vu comme un oscillateur (modèle de Lorentz).

La jonction P/N

          Que se passe-t-il lorsqu'on dope une partie d'un cristal semi-conducteur de type P et l'autre de type N, sans discontinuité cristalline ?

La première partie est caractérisée par une conduction de type P, l'autre de type N. La « frontière » entre les deux parties s'appelle jonction P/N. C'est à cet endroit que la conductivité s'inverse, mais c'est aussi là que règne un champ électrique interne intense dont l'effet est d'accélérer les porteurs de charge.
 

Rappelons en effet que dans la partie dopée P du cristal il y a un certain nombre d'atomes étrangers ionisés négativement et un nombre égal d'atomes du matériau intrinsèque ionisés positivement.
Ces porteurs de charge sont appelés porteurs majoritaires car leur nombre est beaucoup plus élevé que celui des porteurs intrinsèques (appelés porteurs minoritaires) même pour un taux de dopage faible. Dans la partie dopée de type N, les porteurs majoritaires sont des électrons, les atomes étrangers étant ionisés positivement.

En absence de champ électrique externe, il s'établit spontanément un équilibre thermodynamique entre les charges positives et les charges négatives qui ont tendance à migrer les unes vers les autres. L'équilibre s'établit dès qu'une double couche ionique s'est formée à la jonction entre les deux zones. Le champ électrique interne résultant, très intense, s'oppose alors à la migration ultérieure des porteurs. Dans la zone de jonction, le potentiel électrostatique varie brutalement en s'inversant, tandis que la concentration en porteurs majoritaires varie, elle aussi, brutalement. En effet, dans la zone dopée P la concentration en trous reste constante jusqu'à proximité de la jonction (elle est égale aux taux de dopage P), puis elle diminue brutalement et s'annule rapidement au-delà de la jonction. Il se produit la même chose pour la zone dopée N. Le champ électrique interne qui règne à la jonction a la propriété d'accélérer le passage des électrons, en sens inverse du champ, et à s'opposer à leur passage dans l'autre cas.

La jonction exerce un effet redresseur sur un courant alternatif. Le dispositif comprenant une jonction P/N s'appelle une diode, son rôle est de laisser passer le courant dans un sens et à s'opposer au passage du courant dans l'autre sens.Les semi-conducteurs sont utilisés notamment dans le domaine des télécommunications et de l'informatique (transistors) ainsi que pour la fabrication de cellules photovoltaïques.

 

Schéma de la jonction P/N

Schéma de la cellule photovoltaïque


 

Schéma de la diode
Diode polarisée en sens inverse: le courant ne passe pas Diode polarisée en sens direct