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"La Nature aime se cacher"

Aristote

Observations

Observations au Mont-Gros

icone observations

Nous verrons dans cette partie les différentes étapes accomplies durant plusieurs nuits, pour réaliser le suivi observationnel d'une RR Lyrae, RW Cnc, à l'observatoire de Nice au Mont-Gros.
Nous aborderons dans un premier temps, les caractéristiques du matériel mis à notre disposition pour les observations.
Puis, nous terminerons sur la réduction de données, c'est-à-dire l'analyse ainsi que l'interprétation des données que nous avons obtenues.

Dispositif utilisé

Optique

Il existe différents type d'instruments pour observer le ciel. Citons parmi eux la lunette et le télescope. On nous a mis à disposition un télescope Ritchey-Chretien, que nous pouvons voir sur la figure 1.

instrument d'observations
figure 1 - Les différentes parties du télescope Ritchey-Chretien de l'OCA
  • Le tube est l'ensemble optique de l'instrument. Il diffère selon que l'on a à faire à une lunette ou à un télescope. Ici, c'est un tube Meade de 40cm de diamètre, de configuration Ritchey-Chretien. Ce type de tube présente l'avantage de corriger toutes les aberrations chromatiques de manière efficace et propose des performances exceptionnelles pour la pratique de l'astrophotographie. On pourra noter que le tube Ritchey-Chretien a été utilisé dans la conception du télescope spatial Hubble. Sur le tube est posé le chercheur, qui est une petite lunette (de 9cm de diamètre ici) avec un faible grossissement, pour pouvoir repérer rapidement l'objet que l'on veut cibler.
  • À la sortie du tube, est raccordée une caméra "SBIG ST1000" dotée de capteurs CCD, très sensibles, qui nous permet des prises de vue des astres observés directement sur l'ordinateur.
  • La monture supporte le tube, et c'est la partie mécanique qui va permettre de suivre un objet dans le ciel. Cet instrument est équipé d'une monture équatoriale Astro-Physics 1200GTO, automatisée par système de commande "GoTo". Le "GoTo", permet, grâce à une manette appelée "raquette", de pointer automatiquement un astre que l'on a choisi au préalable et d'assurer son suivi. La monture est également équipé d'un contrepoids, permettant d'assurer la stabilité de l'ensemble de l'instrument.
  • Le trépied supporte l'ensemble. Il est important car il doit assurer une bonne stabilité et absorber les vibrations pour une observation de bonne qualité. Il est réglable en hauteur, et nous allons préférer sa position la plus basse, offrant la meilleure stabilité.
Schéma optique Ritchey-Chrétien
figure 2 -Schéma optique d'un télescope Ritchey-Chrétien

Un tube Ritchey-Chrétien est constitué d'un miroir principal et d'un miroir secondaire. Ces deux miroirs sont hyperboliques. Comme le montre la figure 2, les rayons lumineux vont d'abord être réfléchis sur la miroir principal, qui va les réfléchir à son tour sur le miroir hyperbolique secondaire. Les rayons lumineux finiront leur course sur le plan focal qui coïncide avec le plan de la camera CCD.

Logiciels

Nous contrôlons le télescope à distance, à partir d'un poste de travail, dont un aperçu est proposé sur la figure 3.

bureau d'observation
Figure 3 - Notre bureau d'observation: "la Cabane de Jean" !

Nous utilisons un ordinateur où sont installés différents logiciels qui vont nous servir lors de nos observations :

  • Le logiciel Stellarium, un planétarium virtuel (voir aperçu sur la figure 4) qui nous permet de connaître les coordonnées des objets célestes que nous voulons observer
  • Le logiciel PACS, du projet PAIX en antarctique, qui permet de contrôler le télescope et la caméra CCD.
vue stellarium
Figure 4 -Vue de Stellarium

Sources

Observations et acquisitions de données

Refroidissement de la caméra

Avec le logiciel PACS, nous devons d'abord refroidir la caméra CCD avant utilisation. Mais pourquoi ? Pour le savoir, détaillons brièvement le principe de fonctionnement d'une caméra CCD:
Chaque pixel de la camera CCD est en fait un semi-conducteur. Lorsque des photons suffisamment énergétiques "percutent" les atomes du semi-conducteur, l'énergie transmise aux électrons de la bande de conduction de ces atomes va leur permettre de "s'échapper", ce qui aura pour effet de créer un courant. C'est ce qu'on appelle l'effet photo-électrique. L'ordinateur sera capable de mesurer l'intensité de ce courant pour chaque pixel et de l'interpréter pour en faire une image.
Sachant cela, il est évident qu'il y aura un effet Joule, et que la camera chauffera. Il est alors nécessaire de la maintenir à une température raisonnable pour éviter des dommages.
PACS nous permet de refroidir la camera et de la maintenir à une température fixée grâce à l'effet Peltier. Expliquons l'effet Peltier. Imaginons deux conducteurs a et b de natures différentes relié en deux points X et Y comme c'est le cas sur la figure 5
Imaginons maintenant que nous plaçons un générateur de courant entre Y et Z et que nous appliquons un courant dans le sens Y -> Z. Les électrons se déplacent donc de Y à W. Au point W, les électrons font augmenter l'entropie \(S \) en W, ce qui aura pour conséquence d'avoir une variation de chaleur \( Q \) positive (\(\Delta S \propto Q \)). Inversement, en X, l'entropie va diminuer et il y aura perte de chaleur. En inversant le sens du courant, X sera plus chaud et W plus froid.
Si on adapte cette idée à la camera CCD, on est capable de refroidir continûment les semi-conducteur qui captent les photons, évitant ainsi qu'ils soient endommagés par une trop forte température.

Circuit
Figure 5 - Circuit formé de deux conducteurs a et b, et d'une générateur de courant entre Y et Z

Calibration de PACS avec le télescope

Il se peut qu'après une longue période d'inutilisation, le logiciel PACS ne soit pas correctement calibré. Cela veut dire que si on lui fournit un couple de coordonnées d'ascension droite et de déclinaison, il fera pointer le télescope à des coordonnées incorrectes.
C'est pourquoi on exécute une manipulation en début de séance d'observations, afin de recalibrer PACS avec le télescope. Il suffit de pointer, avec le télescope, un astre assez visible et dont on connait les coordonnées (nous avons utilisé Jupiter). Une fois que nous avons vérifié à l'écran (ou dans le chercheur) que l'étoile est bien centrée, nous indiquons à PACS, que ce sont les bonnes coordonnées. La synchronisation est alors terminée.

Recherche et suivi de l'étoile de type RR Lyrae : RW Cnc

Pour cibler cette étoile, il n'y a rien de plus simple. Nous rentrons ses coordonnées équatoriales (Ascension droite : 9h20min0,52s / Déclinaison : +29°00'00,7'') dans PACS et il fera pointer le télescope sur l'étoile, et nous ajusterons manuellement la position si nécessaire.
Une fois que nous avons RW Cnc en ligne de mire, nous cherchons une étoile proche connue, dans le champ de la caméra. Cette étoile va être une référence en magnitude. En effet, en observant RW Cnc dont la magnitude va varier, PACS va pouvoir détecter la variation de magnitude de RW Cnc par rapport à notre étoile de référence dont la magnitude est connue. C'est ce qu'on appelle de la photométrie d'ouverture.
Dès lors, il ne nous reste plus qu'à programmer les acquisitions de la caméra (fréquence, temps de pose...) et le télescope suivra de lui-même l'étoile pendant toute la durée de l'observation, grâce au système automatisé de la monture équatoriale et au logiciel PACS, permettant de compenser le mouvement de rotation de la Terre sur elle-même.

Réduction des données

Durant nos observations, nous avons obtenu plus de 200 images de l'étoile RW Cnc comme celle de la figure 6, d'un temps de pose de 60 secondes chacune, représentant près de 4h d'observations en continu.

Image obtenue
Figure 6 - Une des images obtenues, avec "RW Cnc" au centre.

L'utilité de prendre autant d'images, est de détecter des variations de magnitude de l'étoile variable pendant une durée non négligeable par rapport à sa période de pulsation. Le but est d'obtenir une courbe de lumière pour caractériser visuellement la variation de magnitude.
Pour traiter ces images, nous utilisons un logiciel appelé MaXimDL pour faire, ce que l'on appelle dans le jargon de l'astronomie, une réduction de données.

Logiciel MaXimDL
Figure 7 - Menu principal du logiciel MaXimDL.

Via le menu principal (figure 7), nous allons ouvrir toutes les images simultanément. Ensuite, dans le menu "Analyze", nous irons dans "Photometry".
Cet outil va comparer la magnitude de RW Cnc par rapport à l'étoile que nous avons choisi en référence (magnitude constante dans le temps) qui est aussi présente sur les images acquises.
Pour cela on sélectionne, sur une seule image, l'étoile RW Cnc, grâce à un curseur qui la désigne comme Obj1 (figure 8). Puis, on sélectionne l'étoile de référence, de magnitude stable, grâce à un autre curseur qui la nomme Ref1.
Automatiquement, le logiciel va reconnaître ces deux étoiles, sur toutes les autres images, malgré le fait qu'elles ne se superposent pas exactement entre-elles (ce qui est dû, entres autres, aux erreurs de suivi de la monture, aussi faibles soient-elles).

Outil photometry
Figure 8 - L'outil "Photometry" du logiciel MaXimDL

Ensuite, nous cliquons sur "View Plot", et le logiciel nous prévient alors que certaine photos ne sont pas exploitables. Pour cela, on clique sur "Exclude" qui permet de ne pas prendre en compte ces photos pour la représentation de la courbe de lumière.
Dès lors, on obtient un graphe (figure 9) présentant en abscisse, le temps, et en ordonnée, la variation de magnitude de RW Cnc par rapport à celle de l'étoile de référence (ici fixée arbitrairement à 0 car l'étoile que nous avons pris pour référence était en fait une étoile dont la magnitude n'était pas connue).

Graphe de l'étoile RW Cnc
Figure 9 - Graphe présentant la variation de magnitude de RW Cnc par rapport au temps

Nous remarquons que la magnitude de RW Cnc croît, c'est-à-dire que son éclat diminue, ce qui signifie que durant les observations, RW Cnc était dans sa phase de contraction. Nous remarquons aussi que la descente est assez "chaotique", ce qui s'explique que les mesures que nous avons effectuées n'étaient pas optimales.
Bien entendu, nous n'avons obtenu qu'une petite partie de la courbe de lumière de l'étoile. Nous aurions dû récolter des données pendant plusieurs jours consécutifs, mais la météo ne nous l'a pas permis.
Nous pouvons seulement savoir que l'étoile se contractait pendant nos observations et rien de plus. Néanmoins, nous avons pu nous initier aux observations astronomiques, ce qui est d'une grande consolation.

Sources

  • Chadid, Vernin, Preston et al. 2014, AJ 148,88

Dans la prochaine partie, Traitement de données, nous étudierons des données venant de l'observation de deux étoiles RR Lyrae par le satellite Corot. Ces données, plus précises, nous fourniront beaucoup plus d'informations sur ces étoiles.